Management civil et commandement militaire



Rédaction de la RMS


A l’occasion de la parution de son ouvrage intitulé "De la philosophie essentielle du commandement militaire", aux éditions Lavauzelle, Philippe CHOLOUS revient sur la nécessité d’une approche philosophique des rapports d’autorité, comme un indispensable préalable à la définition puis à la mise en œuvre d’une doctrine au sein des organisations de toute nature. Officier d’active, l’auteur a effectué une longue carrière au cours de laquelle il a alterné les commandements opérationnels et les postes à responsabilités, tant en métropole, qu’outre-mer ou en opérations extérieures.



D’où vous est venue l’idée de cet essai ?
 
J’ai fait mes études au début des années 1980. Ce furent les années Reagan, les années Thatcher, les années Tapie, celles de la multiplication des écoles de commerce et du libéralisme triomphant. Il ne m’appartient de porter un quelconque jugement sur cette époque, qui doit être assumée comme toute période de notre histoire. Toutefois, pour louable qu’elle soit, la volonté des responsables privés et publics de tirer alors le meilleur parti des moyens matériels et des ressources humaines qui leur avaient été confiées, a abouti à une confusion des genres dans la direction et la gestion des organisations.
 
Qu’entendez-vous par confusion des genres ?
 
L’idée du primat de l’efficacité, a été érigée en dogme. Dès lors, dans un souci premier de pragmatisme et d’optimisation des organisations tant privées que publiques, les uns et les autres se sont mis à la recherche des meilleures solutions. Chacun cherchait frénétiquement la pierre philosophale sous le sabot de son cheval. Les économistes se sont mis à emprunter le langage des militaires, voire leurs concepts. De leur côté les militaires se sont mis à vouloir « civilianiser » à marche forcée leurs forces armées.
 
En quoi cette démarche est-elle, d’après vous, condamnable ?
 
Cette démarche n’est aucunement condamnable. Elle participe même d’une ouverture d’esprit et d’un respect des compétences de l’autre qui est légitime et honore leurs auteurs. En revanche, ce qui fut et demeure problématique, c’est l’absence de recul. On s’est enfermé dans une vision réductrice, on s’est soumis au diktat de l’efficacité immédiate, sans distinguer l’essentiel de l’accessoire, sans s’interroger sur la question de savoir si l’ordre des choses n’a pas une raison d’être. En effet, avant de s’intéresser aux domaines techniques, il importe de s’interroger sur le sens que revêtent les organisations en tant que telles, ainsi que sur les principes inhérents à leur finalité propre. Cette étape est incontournable pour les décideurs. Fort heureusement, comme nous le rappelle Saint Simon, « Dieu souffle sur le projet des hommes » et sans ce socle intellectuel, il n’est guère de réforme qui puisse s’inscrire dans la durée.
 
Votre ouvrage offre-t-il des clefs ?
 
Des clefs de compréhension oui. Des solutions immédiates, non car je n’ai pas cette prétention. Mon ouvrage n’a pour objet que de susciter la réflexion du lecteur sur les problèmes de fond liés à l’exercice de l’autorité. Il est bien entendu fondé sur ce que je connais, le commandement militaire. Toutefois, il est susceptible d’intéresser les responsables civiles, managers et gestionnaires des ressources humaines, car dans ce sujet, beaucoup de choses se définissent par rapport au management civil. Celui-ci est donc omniprésent dans l’ouvrage, se trouvant de facto défini en creux.


CHOLOUS, P. 2015, De la philosophie essentielle du commandement militaire, aux éditions Lavauzelle. 
 


Rédaction de la RMS