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Revue de Management et de Stratégie
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Optimiser le fonctionnement de l’entreprise pour créer de la valeur




Fabrice Detterman


En leurs temps, le fordisme et le toyotisme étaient déjà des précurseurs de l’innovation organisationnelle et de procédé. Aujourd’hui encore, c’est en cherchant à optimiser ou à réinventer la façon d’exercer leur métier que des entreprises explorent de nouvelles voies de création de valeur. A raison, puisque certaines d’entre elles sont (re-)devenues leaders sur leur marché.



Crédit : David Armanao (Flickr)
Crédit : David Armanao (Flickr)

Optimisation du fonctionnement de l’entreprise et management

L’optimisation du fonctionnement de l’entreprise fut longtemps consacrée, industrialisation oblige, à l’organisation technologique et humaine autour de la chaîne de production. Aujourd’hui, la réflexion porte plutôt sur le sens de l’autonomie au travail et sur le bienfondé d’une responsabilisation individuelle accrue. En effet, nous sommes entrés dans une économie de services dont mobilité, instantanéité et hyper-connectivité sont les murs porteurs. En d’autres termes, voilà de quoi remettre en cause l’organisation mécaniste du travail telle qu’on la connaissait encore au siècle dernier.

Ainsi, jamais la nécessité de repenser notre conception de la hiérarchie n’a été aussi pressante. Avec son ouvrage « Les employés d’abord, les clients ensuite », l’entrepreneur indien Vineet Nayar s’inscrit par exemple dans cette tendance. A la tête de HCL Technologies, une entreprise de services informatiques alors sur le déclin, Vineet Nayar avait décidé « d’inverser la pyramide organisationnelle » pour placer les employés en tête des priorités de l’entreprise et leur donner un véritable pouvoir décisionnel. La transparence et la responsabilisation sont érigées en principes fondateurs – autant que novateurs –, qui viennent bouleverser les schémas d’organisation précédents. Les résultats sont spectaculaires : le chiffre d’affaires de HCL triple en moins de 4 ans. « En mettant les employés d’abord, les clients ensuite, HCL crée de la valeur pour ses clients », résume Vineet Nayar.

L’entreprise française Lippi, acteur de référence dans le monde de la clôture, a également pris un véritable tournant organisationnel lorsqu’elle a décidé, en 2007, de « laisser aux salariés une liberté suffisante pour qu'ils se saisissent des problèmes », explique Odile de Nantes, responsable RH. La hiérarchie est « aplatie », et chaque employé est libre de prendre des initiatives. Préalablement, une culture numérique a été instaurée grâce à la formation aux outils de recherche et de partage de l’information. « L'entreprise n'a jamais été aussi solide », assure pourtant Frédéric Lippi, à la tête de l’entreprise qui emploie désormais 250 personnes et pèse plus de 40 millions d’euros de chiffre d’affaires. 

Quand le numérique décloisonne les lieux de travail

Il faut d’ailleurs, d’une façon plus générale, souligner l’implication du numérique dans ces nouveaux modèles organisationnels. Le télétravail en est une bonne illustration. A ce sujet, les études et les sondages se succèdent et se ressemblent : tous les résultats indiquent que les collaborateurs en télétravail sont nettement plus productifs et plus engagés. L’entreprise, de surcroît, réduit ses coûts d’infrastructure ainsi que les coûts induits par  le stress au travail ou les impondérables du quotidien (absentéisme, grèves des transports en commun ou garde d’enfants…). Si beaucoup reste à faire en matière de gestion du télétravail – et du télétravailleur -, de nombreuses entreprises se penchent aujourd’hui sur la question, à l’instar des plus grandes comme Total qui, après une expérimentation réussie en 2012, a finalisé un accord sur la question en 2013. « Le télétravail est une illustration des changements qui touchent le monde du travail », affirme Marie Le Breton, DRH chez Total.

Quant aux réseaux sociaux d’entreprise et aux outils collaboratifs en ligne, ils décuplent les possibilités de travail transversal, en dehors des silos organisationnels classiques. Directeur du développement collaboratif chez L’Oréal, Olivier Amporino explique : « je suis à la croisée du management, de la technologie et de la culture pour optimiser le travail de nature intellectuelle et rendre les organisations plus compétitives ». D’ailleurs cette culture de la transversalité se retrouve désormais… dans des espaces bien physiques, comme en témoigne le développement des fab labs au sein des entreprises. Chez Airbus, le Protospace inauguré en février 2014 met à disposition des salariés un atelier avec un espace de travail collaboratif où le prototypage peut être réalisé en direct. De quoi favoriser l’agilité, la créativité et l’innovation… produit.    

Des modèles économiques complètement réinventés

Et certains acteurs font même de leurs innovations organisationnelles le cœur de leur business model. Zara est ainsi devenue leader mondial de la confection textile, en organisant sa chaîne de création et de production de façon très internalisée et centralisée, dans un secteur où ce n’est pourtant pas d’usage. En réunissant commerciaux et ateliers de prototypage en un lieu unique, proche des ateliers de production, Zara a pu s’imposer avec le modèle de la « fast fashion » qui lui permet de renouveler ses collections en magasin de façon très réactive et régulière.

Dans l’immobilier, c’est une autre innovation organisationnelle qui a permis le développement d’un modèle qui s’impose désormais comme une référence. Lancée en 2002, CapiFrance a réussi l’exploit de devenir la « première agence immobilière de France »… sans agence. En effet, dans le modèle traditionnel des réseaux de boutiques en franchise, les franchisés doivent s’acquitter d’un droit d’entrée puis de charges lourdes liées au paiement des frais de boutique. CapiFrance recrute pour sa part des agents mandataires indépendants qui travaillent depuis leur domicile grâce à une vitrine unique : Internet.

Au bout du compte, l’entreprise redistribue les économies réalisées sous forme de rémunération accrue, de formation pour ses mandataires, et d’investissements dans les outils technologiques. Capifrance est ainsi parmi les premiers acteurs à mettre en place des moyens innovants de Home Staging virtuel au profit de ses clients. Le réseau, enfin, garantit la qualité et l’homogénéité de ses prestations grâce à une organisation bien rodée : des directeurs régionaux, des coaches et 220 formateurs de terrain s’assurent que valeurs et méthodes « sont partagées à l’identique par l’ensemble du réseau », explique Jacques Daboudet, le PDG de CapiFrance. Le siège social, composé de près de 70 collaborateurs, est en charge quant à lui des fonctions support pour l’ensemble des agents : marketing, RH, mais aussi juridique afin d’accompagner efficacement le client jusqu’à la signature des actes devant notaire.

Source de création de valeur, l’optimisation du fonctionnement de l’entreprise peut se décliner concrètement de façons très diverses comme on vient de le voir. Bien orchestrée et spécifique à chaque métier, elle permet à l’entreprise d’améliorer ou de repositionner sa proposition de valeur au service de la satisfaction du client. D’ailleurs, à rebours de nombreuses idées reçues, elle est souvent moins gourmande en moyens financiers qu’en créativité !